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Sep
11

Atlantic BD

Le monde de l’édition de la bande dessinée américaine en France est en train de fondamentalement changer. Entre DC qui change de maison (Dargaud avec Urban Comics), des grandes boites qui décident de se mettre aux comics (Glénat), il y a également de nouveaux éditeurs, des outsiders, qui débarquent. Parmi ceux là, on trouve Atlantic BD, crée par Fabrice Sapolsky, ancien rédacteur en chef de Comic Box !

Morning Glory Academy, ou Morning Glories (titre original) est l’un des deux titres traduits d’Atlantic BD. Cette série de Nick Spencer, étoile montante de Marvel, et dessiné par Joe Eisma. La Morning Glory Academy est l’un des plus prestigieux pensionnats du pays. Mais un sinistre secret au parfum de mort et de mystère se cache derrière ces murs. Quand six nouveaux étudiants, brillants mais turbulents, y sont admis, ils basculent dans un monde mêlant folie, violence et pédagogie…
Pour être franc et honnête, Morning Glory Academy est LA bonne surprise de ce line-up de sortie. Nick Spencer n’est pas une étoile montante pour rien, et cette série publiée chez Image le prouve. Le scénariste montre déjà une certaine maturité dans son écriture avec ici un excellent scénario, qui joue habilement avec les codes de plusieurs genres, mêlant le teenage movie avec le thriller ainsi que plusieurs pointes d’horreur. La construction et la caractérisation des personnages est exemplaires, efficaces et là aussi, joue avec les clichés et les aprioris. Des personnages forts avec un concept déjà vu mais bien exploité, avec une touche d’originalité. Mais surtout une maitrise du suspense, bouleversant justement nos repères dans ce genre d’histoire.
Cette étonnante maitrise scénaristique est sublimée par les cadrages du dessinateur Joe Eisma. Une mise en page maligne, jouant sur les perspectives et l’espace. Une ambition et un talent pour le cadrage, mais des dessins parfois (souvent) inégaux, avec quelques cases brouillonnes. certains décors paraissent vides, certaines expressions sont assez improbables. Des fautes d’inattention, ou de précipitation peut-être, car son style reste peaufiné et se révèle par moment très efficaces.
Globalement excellent, avec un scénario à la limite du brillant et des dessins prometteurs mais parfois brouillon, cet ouvrage est le seul des 3 à ne pas être simplement une introduction, mais qui démarre déjà sur des pistes d’intrigues. Le duo, et la série, a encore du potentiel sous le manteau, et il ne demande qu’à exploser au grand jour !

Time Bomb, l’autre traductions du label, a été originalement publiée chez Radical. Ecrit à 4 mains par le célèbre duo Jimmy Palmiotti et Justin Gray (Jonah Hex), et dessiné par Paul Gulacy, la série est une série d’action/espionnage.
Une cité sous-terraine bâtie par les Nazis est découverte en plein centre de Berlin. Cette ville a été construite pour permettre à Hitler et ses troupes de survivre à une attaque nucléaire. Mais elle abrite également une bombe Omega, arme de destruction massive capable de détruire toute l’Europe. Déclenchée par mégarde (bande de looseurs), elle va provoquer la fin du monde dans moins de 24h. À moins qu’une équipe de mercenaires sans foi ni loi n’arrivent à remonter le temps de 24 h pour empêcher cela (L’ageeeence touuus risqueeees !). Mais ici comme ailleurs, les meilleurs plans ne se déroulent pas toujours sans accrocs.
Ce premier tome est une introduction très classique de film d’action, avec la présentation des personnages et des enjeux. Le tout est plutôt bien mené, par des scénaristes que l’on sent passionné et connaisseur de ce genre de film. Il n’empêche que cela ne reste qu’une introduction, et laisse donc sur sa fin. Le concept de la série, basé sur le voyage dans le temps (on voit déjà pointer des paradoxes temporels, mais passons) et plusieurs idées sont posées par ce tome 1, ne demandant qu’à être exploitées.
On le sait, les dessins, chez Radical, ne sont pas vraiment un point fort de leurs productions (Last Days of American Crime étant l’exception qui confirme la règle). Time Bomb est donc dessiné par Paul Gulacy, qui a bossé sur des séries comme Batman et Master of Kung Fu, et il faut avouer, c’est pas brillant. Les planches sont très inégales, avec de temps à autres des décors, des visages ou des cadrages qui sortent de lot, mais qui se révèle globalement moche. On remarque également quelques emprunts à d’autres artistes, avec des fulgurences de Butch Guice (les quelques cades muettes de ce tome sont ultra efficaces) ou  de Ethan Van Siver (on retrouve les visages assez improbables propres à l’artiste).
Globalement, ce premier tome est une introduction honnête qui se tient scénaristiquement, mais un peu faible graphiquement, qui sans casser trois patte à un canard, est assez intrigante, tout du moins suffisamment pour susciter une attente de la suite.

Black Box est la seule oeuvre crée spécialement pour Atlantic BD, écrite par Fabrice Sapolsky (dont le premier coup d’essai, avec David Hine, Spider-Man Noir, était plutôt sympa et prometteur), et dessiné par Thomas Lyle.
L’histoire, c’est celle de Ulysse Troy, archiviste à la Maison Blanche, qui va se retrouver plongé dans un flot de secrets et de révélations sur le gouvernement. Sans trop révéler l’histoire, l’oeuvre se veut un thriller sur base de secret et de conspiration (le tout rappelant Wikileaks).
Fort de son concept intelligent au potentiel assez élevé, Sapolsky commence sur de bonnes rails. Se dernier écrit son scénario de manière très télévisuel, avec une construction dynamique, accentué par les révélations à la chaine. Le scénariste, qui a fait des années d’études d’histoire, utilise ses connaissances sur la culture et l’histoire des Etats Unis afin de donner une cohérence, une légitimité. Le problème est que le scénario cède par trop de simplicité, de raccourcis et d’incohérences. Certains passages, assez improbables, sont justifiés à la truelle afin de passer au mieux à la scène suivante, ainsi que d’amener les enjeux prévus. D’autant plus que ce tome 1 ne reste qu’une introduction à quelque chose de plus ambitieux, qui pose des bases assez fragiles malgré ses ambitions.
La partie graphique quant à elle est assez faible. Il respire un goût d’inachevé dans les planches de l’artiste Thomas Lyle (absence d’encrage, visages et décors approximatifs, couleurs fades). Une certaines fragilité dans ses planches qui, malgré tout, là aussi, proposent certains cadrages ambitieux et des découpages dynamiques, avec cette volonté (encore une fois très télévisuel), de coller au scénario de Sapolsky.
Moyen, malgré ses quelques bonnes idées et un fort potentiel qui reste inexploités, Black Box appelle inexorablement à un second tome. Une équipe jeune (dans sa collaboration) qui doit évoluer pour donner plus d’impact à la suite de son œuvre.


Atlantic BD arrive donc sur le marché avec un catalogue de trois titres, de genres variés (action, thriller horrifique et thriller historique) qui a pour vocation d’évoluer, de s’agrandir afin d’accueillir de plus en plus de séries qui n’ont pas la chance d’une publication VF mais également, des ouvrages originaux.
Beaucoup ont critiqué sur internet le peu de pages des albums de l’éditeur, et c’est une critique légitime. Pour du comics, le ratio est assez bas comparé à Delcourt qui fait le double/triple de pages pour 1 ou 2€ plus cher. C’est d’autant plus frustrant de lire 1 ou 2 épisodes des séries proposées car elle suivent un rythme particulier, commun à beaucoup de comics mainstream actuels, qui sont pensés en TPB de 4/5/6 numéros. Mais derrière, il y a la volonté de fournir un véritable travail éditorial. Le format est agrandi, il y a une unité graphique entre chaque œuvre d’un point de vue de la maquette et de la qualité des ouvrages. On reprochera tout de même un traduction assez hasardeuses avec des fautes incroyables («un voyages»). Si l’on voit ses œuvres du point de vue d’un lecteur de franco-belge, le rapport qualité/prix est bon, malgré la plus petite taille des objets ainsi que le contenu très américain dans le style (qui ne sied pas toujours, du moins graphiquement, aux attentes de ce lectorat). Si l’on voit ça du point de vue d’un lecteur de comics, le rapport est très faible mais l’édition est soignée et les séries ne sont pas de gros hits outre-atlantique (ce qui amène une fraicheur au label)
Le line up d’Atlantic BD est donc varié, avec un vrai boulot de la part de l’éditeur. Mais son problème fondamentale est la cible visée. En effet, le risque est de rater les deux cibles (lectorat comics et franco-belge), malgré les qualités des ouvrages. La boite à au moins l’honneur de proposer des séries qui peuvent se révéler être d’excellents outsiders, et défendre une vision du #9èmeArt propre au fondateur du label Fabrice Sapolsky, à savoir que la BD n’a pas de frontière et n’a pas besoin d’être catégorisé)

Bigor BD


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