COME BACK ! Après plusieurs semaines d’absence inattendues et sûrement peu appréciées de votre part (ce qui est tout de même légitime), l’article musical du mardi revient en force pour continuer à explorer les magnifiques années 90 qui furent riches en nouveautés, en évolutions et en albums de malades, en artistes fous et en expérimentations toutes plus excentriques les unes que les autres. Forcément, ça a pas toujours été beau à entendre (et à voir) mais parfois, le résultat cassait la baraque. Une nouvelle démonstration cette semaine avec les Beastie Boys et cette bombe de skeud appelée Ill Communication !
A l’origine groupe de punk, les Beastie Boys se sont ensuite essayés au hip hop et à un mélange des genres nouveau pour l’époque, créant carrément l’évènement lors de la sortie de Licensed to III, leur premier album, en 1986 qui est considéré aujourd’hui comme l’un des premiers si ce n’est LE premier succès hip hop d’un groupe majoritairement blanc, sortant le genre d’une communauté restreinte et l’ouvrant à un public plus large, le succès étant international. Après un second album produit par ce qui allait devenir les Chemical Brothers et un troisième au succès raisonnable, le groupe explosa tout sur son passage en 1993 avec la sortie de ce Ill Communication, considéré à raison comme le chef d’œuvre ultime de la formation.
Un album qui montre la densité de la musique du groupe et la multiplicité des influences dès le premier titre Sure Shot structuré sur un simple air de flute répété en boucle, par dessus lequel une rythmique soutenu Mike D, MCA et Ad-Rock impose un flow agressif et groovy. Le résultat est atypique et étonne alors que Tough Guy et son riff punk bien gras et en arrière plan résonne sur un rap ultra rapide, totalement contre balancé par l’intro de B-Boys Makin’ With The Freak Freak (un titre pareil ça ne s’avance pas), où l’on entend un message téléphonique en français appelant un certain Adam, avant d’envoyer de la rythmique entrainante, de la basse qui fait bouger son body et les voix du groupe en mode mégaphone (ça grésille généreusement). Retransition rapide et over the funk avec Bobo On The Corner (guitare fuzz, basse grasse et groovy, tambourins en folie…) et c’est Root Down qui arrive, résonnant comme la rencontre inédite et remixée entre le son des Beastie Boys et la bande originale de Shaft (dont on peut discerner le célèbre riff) avant de se manger l’uppercut magistral de l’album, le premier single lors de la sortie qui a mis tout le monde sur le cul, cette énorme tuerie de Sabotage bourrée à la ligne de basse qui fait mal, à la rythmique saccadée et aux interventions brutales de guitare : Ultra culte, ultra efficace… Un classique. Mais ne se reposant pas sur leur acquis, les Boys renvoient le flow de façon psychédélique avec Get It Together avant de se la jouer cool dans une petite session instrumentale très funk et très détendue appelée Sabrosa. On reprend un peu la danse avec un autre mix improbable dans lequel on croise des tam-tam venus des îles, une basse funk encore une fois, des synthés et une voix shootée au numérique dans The Update. Futterman’s Rule se pose en acid funk aux accents country/rock des plus surprenants, Alright Hear This envoi son implacable rythme qui traversera votre corps en moins de temps qu’il ne faut pour le dire et Eugene’s Lament fait halluciné l’auditeur pour peu que celui-çi soit déjà en transe, ce qui est fort probable. Flute Loop reprend la formule du premier titre et en refait la démonstration avec brio tandis que Do It sent le bon son old school tranquille afin de préparer le terrain pour un Ricky’s Theme qui semblerait presque sortir d’un club de jazz lounge. Heart Attack Man sonne comme un pétage de plomb punk qui vient foutre un coup de pied au cul de tout ce passage un peu trop calme et on récupère les bonnes habitudes funky et rythmées pour The Scoop, avant d’achever le tout par un Shambala rappelant les trips hallucinatoires et ambiants du Jamiroquai de la grande époque, par un Bodhisattva Vow réunissant le flow de la bande et une bonne louche d’influences orientales quand enfin Transitions conclue l’ensemble par une note instrumentale posée et jazzy.
Avec ce disque, les Beastie Boys montrent encore une fois et mieux que jamais qu’ils sont de véritables touches à tout, piochant dans n’importe quel style pour mieux construire un hip hop rythmé et quasi agressif mais toujours entraînant, efficace et surtout, étonnant. Autant dire que dans une période aussi creuse actuellement, s’en passer tiendrait de la folie.
Xidius