Ryan Bingham est le fossoyeur des entreprises américaines. Son métier: se déplacer dans les quatre coins des Etats-Unis pour annoncer à des dizaines de personnes chaque jour qu’ils sont licenciés, parce que les autres n’en ont pas le courage, et que, pour lui, c’est un métier comme un autre. Le réalisateur de Juno s’offre pour ce rôle cynique l’acteur le plus populaire du monde, George Clooney, excusez du peu.
Alors que Juno était un film davantage axé sur l’âge adolescent, Up In The Air parle profondément du monde adulte à travers une facette déjà très utilisée au cinéma: le milieu du travail, ou comment parvenir à lier vie amoureuse, familiale d’un côté et vie sentimentale de l’autre. Jusqu’ici, rien de très original, me direz-vous.
Mais en fait, le film de Reitman dépasse cet aspect, largement stéréotypé. Comment pouvez-vous vous comporter dans la vie de tous les jours quand la votre se résume à détruire celle des autres? Comment évoluer dans un monde plein de bons sentiments, fait de valeurs morales ou religieuses, d’obligations comme le mariage, quand vous ne partagez pas la même idée du bonheur, ou bien même lorsque vous pensez que le bonheur qu’on vous propose est impossible, ou illusoire? C’est toute la question posée ici par ce film, qui donne au moins matière à réflexion.
Le personnage incarné par George Clooney ne manque pas d’intérêt. Jouant avec finesse et justesse, l’acteur semble s’amuser dans ce rôle et confirme que malgré quelques égarements ici et là dans d’autres films, il reste une valeur sûre d’Hollywood. Ryan Bingham, type odieux uniquement intéressé par ses Miles et sa carte d’American Airlines, est l’archétype du monstre dans le système du travail en entreprise aux Etats-Unis: il est cynique, très hypocrite, menteur, manipulateur et exerce son métier sans compassion ni honte, il fait son job. Pourtant, au fil du temps, on creuse cette méchanceté et on découvre une autre facette, plus humaine, qui tend à l’attendrir sous nos yeux. Sans dévoiler le scénario, rondement mené, la fin nous invite à réfléchir sur ces personnalités complexes qui hantent le monde du travail: ne sont-il pas condamnés à rester ce qu’ils sont, et ne sont-ils finalement plus à plaindre que les autres?
En dépit d’une histoire sentimentale très (trop?) prévisible, de quelques longueurs ici et là, et d’un certain nombre de questions laissées en suspend sans réponses, le film de Reitman est un modèle du genre, fait en toute simplicité et qui délivre un message limpide, sans être fade. Très ancré dans l’actualité, il sera très apprécié de ceux qui baignent dans le milieu.
Oceanlook.