Archive pour 23 janvier 2010

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Gainsbourg (vie héroïque). Mais à quoi ça rime?

Parmi les films les plus attendus de ce début d’année 2010, Gainsbourg (vie héroïque) est sorti mercredi dernier au cinéma. A peine refroidi par les quelques critiques, mauvaises soit-dit en passant, que j’avais lues, je me suis plongé hier soir dans le film, espérant y retrouver l’âme d’un des plus grands artistes de la chanson française, Serge Gainsbourg.

Autant le dire de suite, histoire de tuer le suspens (en même temps si vous lisez le titre vous comprendrez vite mon point de vue), j’ai été extrêmement déçu après la projection du film de Joann Sfar, d’une part parce que je pense que le sujet méritait un meilleur traitement, mais d’autre part parce que le chemin emprunté par le réalisateur me semble dénué d’intérêt. Mais expliquons-nous davantage.

Dis-moi, Joann, ton film, c’est un biopic raté ou un conte raté?

Disons-le sans détour, le film consacré à Serge Gainsbourg ne raconte pas grand-chose. Que voit-on à l’écran? Une série de courtes histoires qui s’enchainent sans êtres reliées entre elles. Chronologiquement, on est totalement perdu dans ce capharnaüm scénaristique, puisque que nous ne disposons d’aucun élément sur lequel s’appuyer. La période qui parle de l’enfance n’est pas tout à fait inintéressante, mais elle ne nous apprend pas grand-chose sur l’artiste en devenir. Et puis brusquement, la transition, soudaine dans le monde adulte, et le début des conquêtes féminines. Comment en est-il arrivé là? Le spectateur n’aura pas de réponses. Ce film montre, mais il n’explique jamais.

Cet exemple est un résumé du film, qui est cousu dans un enchainement de tableaux présentant Gainsbourg avec les femmes de sa vie. Juliette Greco, Brigitte Bardot et Jane Birkin se succèdent à l’écran, mais avec des bons monumentaux entre chacune d’elles. Où est le lien? Qu’est-ce qui a poussé Gainsbourg à aller voir ailleurs? Pourquoi s’intéresse-t’il à ces filles?

Comble de l’horreur, du mauvais goût, avec ce double dont on ne sait s’il est malveillant ou bienveillant, qui poursuit Gainsbourg. Idée amusante, intéressante, pas peu ou pas au approfondie. C’est un personnage ridicule, genre carton-pâte ignoble, avec une voix ne collant pas au personnage. Là encore, on ne nous explique pas les intentions de cette hallucination, que veut-il faire de Serge, veut-il le précipiter dans l’abîme, le propulser dans la lumière. On ne saura pas. Il n’apporte rien, sauf peut-être à alimenter le délire du réalisateur, en manque d’inspiration, pour sortir son film de la banalité, donc de la médiocrité.

Quelques fois, on se dit que ça peut, que ça va décoller . Je pense aux scènes avec Boris Vian ou avec Brigitte Bardot (sublime Laetitia Casta). Mais le film retombe aussitôt dans ses travers. Quant à la fin de l’oeuvre, elle est carrément honteuse. Non seulement les dernières images sont en contradiction avec les ultimes minutes, mais en plus on ne ressent rien face au Gainsbourg décadent, parfois génial, toujours provocateur, car il n’y a rien derrière, aucune opinion, aucune hypothèse. On aurait aimé voir sa solitude, le voir plus touchant, plus fou, plus prodigieux. Quand on pense qu’il n’y a aucune réflexion sur ses textes, sur la façon dont il composait! On ne sait rien de plus en quittant la salle.

Ce que Sfar appelle un conte est une arnaque, un intitulé qui marque ses lacunes sur ce personnage qu’il dit regretter. Gainsbourg valait mieux que ce conte fade, délié, haché, cette fin bâclée.

Eric Elmosninno est un acteur formidable, l’interprétation est farouchement juste, mais il traîne derrière lui un film bourré de lourdeurs.

Oceanlook.




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